« L’Italienne à Alger » à l’Opéra Comédie
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« L’Italienne à Alger » à l’Opéra Comédie

 

 

Pour raconter cette histoire, nous avons choisi un décor unique où s’interpénètrent deux civilisations, la nôtre d’aujourd’hui et l’autre, ancienne, mystérieuse, indéfinissable, et que nous avons voulu rappeler en nous servant d’objets, de costumes, de masques empruntés aux Arts premiers. Ce qui paraissait à l’époque de Rossini comme une turquerie, un ressort efficace de la comédie, sonne aujourd’hui comme un questionnement sur les fondements de notre participation au monde multiculturel qui est le nôtre aujourd’hui.

David Hermann, metteur en scène

A l’Opéra Comédie, L’Italienne à Alger a fait un malheur ! Les trois représentations ont été couronnées de succès avec un public venu très nombreux qui a fait un triomphe aux chanteurs et aux musiciens. Cet opéra est une réussite par son jeu scénique et l’accompagnement musical. On perçoit une harmonie et une entente entre le plateau et le chef d’orchestre. Par sa rigueur, Michael Schønwandt a permis le maintien de la musique fougueuse de Gioacchino Rossini (1792-1868), génie de l’opéra italien. Dimanche 1er octobre, c’était la Dernière : le rideau s’ouvre devant un décor impressionnant, nous ne sommes pas à Alger, mais dans un « ailleurs ». Et les procédés comiques de L’Italienne, pièce écrite pendant le premier quart du XIXe siècle, vont faire leurs effets…

Une mise en scène hilarante pour un Orient en retrait

Le plateau se compose d’un avion de ligne écrasé en pleine forêt vierge, ce pourrait être l’Amazonie ou un bout d’île. Le décor monumental a été conçu par David Hermann, il offre un cadre éloigné de l’Orient pour l’une des œuvres phares de Rossini, L’Italienne à Alger. Le metteur en scène a souhaité conserver de l’orientalisme rossinien « une étrangeté du lieu et de ses habitants, un cadre propice à stimuler l’imaginaire du spectateur ». David Hermann recourt à une terrain cognita en raison du contexte qui rend délicat le traitement de certains sujets. En juillet dernier, un article du Monde intitulé L’opéra orientaliste a-t-il une tête de Turc ? rappelait les tensions entre Orient et Occident et la difficulté de la mise en scène du répertoire lyrique. Sur le plateau de l’Opéra Comédie, le metteur en scène réunit des univers : « Chacun apprend de l’autre, de la différence, et ceci au prix d’étrangetés, d’étonnements, parfois même de révoltes qui font toujours réfléchir. » L’intégralité du livret a bien sûr été maintenu (et les prénoms n’ont pas été modifiés !) ; cette pièce est d’ailleurs intéressante, car elle permet par ses références historiques de rappeler l’importance de l’Empire ottoman même s’il commençait à perdre son emprise au XIXe siècle et elle traite de la thématique du marché des esclaves chrétiens. Rossini n’éprouvait évidemment pas d’animosité pour l’Orient, son opéra utilise la turquerie pour un résultat comique, la rencontre entre les deux civilisations est un sujet de divertissement. Dans cet opéra, les nombreux quiproquos, l’humour, les différents stratagèmes dont le « Pappataci » – Bouffe et tais-toi !, n’ont pas pris une ride ! La mise en scène renouvelée et hilarante proposée à l’Opéra Comédie contribue à la réussite de ce spectacle loufoque.

L’Italienne à l’Opéra Comédie

Rossini a composé cet opéra en 1813, à l’âge de vingt et un ans et en trois semaines seulement. Pour la création montpelliéraine, le public a pu apprécier la scénographie et aussi le choix des costumes comme les robes de soirées d’Isabella – l’Italienne au fort tempérament, la tenue japonaise de l’épouse abandonnée par le Bey Mustafa, les masques africains du chœur, « l’habit » de plumes de Taddeo – un des deux amoureux d’Isabella, élevé au rang de Kaïmakan… Dans cette pièce, Isabella par son courage et sa liberté de ton représente le féminisme avant l’heure. L’héroïne est aussi une séductrice. La scène du miroir, pleine de sensualité à l’Acte II, est particulièrement réussie. Isabella se sait observée et elle en joue, la sensualité de la scène est accentuée par les improvisations au piano-forte. La jeune Hanna Hipp dans ce rôle-titre est certainement la révélation de L’Italienne, elle propose un jeu d’interprétation complet et réalise une belle performance artistique. Hanna Hipp a un talent d’actrice, et dans sa façon de se mouvoir, on pense à la gestuelle des divas du cinéma. Le ténor Armando Noguera pour Taddeo est épatant, notamment au deuxième Acte, ses danses endiablées et son interprétation ont beaucoup fait rire le public. Mustafa interprété par le chanteur turc Burak Bilgili, avec sa voix de basse, est également convaincant. L’Italienne est un opéra exigeant, cet opera buffa s’appuie sur la virtuosité vocale d’un opera seria et va du « cantabile » émotionnel à un délire vocal servant les situations comiques. Quant aux musiciens sous la direction de Michael Schønwandt, ils atteignent un haut niveau avec une musique difficile à jouer – l’Ouverture est sublime.

L’Italienne à Alger est une réussite. La mise en scène révèle une iconographie soignée. Avec cet avion imposant, le plateau de l’Opéra Comédie semble agrandi, tout l’espace même en hauteur est occupé. Il y a des éléments d’Amazonie, d’Afrique, si nous ne sommes pas à Alger, l’essence de l’opéra est là. On adore la série d’onomatopées et les effets de langage loufoques des personnages : cette « folie générale » si bien décrite par Stendhal ! Ce côté joyeux, cette succession de scènes drôles mettent de bonne humeur. L’Opéra Orchestre de Montpellier a rencontré avec ces trois représentations de L’Italienne un succès proche du triomphe : la saison s’annonce prometteuse !

Fatma Alilate

L’Italienne à Alger Opéra en deux actes de Gioacchino Rossini

Opéra Comédie

11 Boulevard Victor Hugo – Montpellier

Michael Schønwandt, direction musicale

David Hermann, mise en scène

Avec : Hanna Hipp – Isabella, Alasdair Kent – Lindoro, Pauline Texier – Elvira, Burak Bilgili – Mustafa, Armando Noguera – Taddeo, Marie Kalinine – Zulma, Daniel Grice – Haly.

Orchestre national Montpellier Occitanie

Chœur de l’Opéra national Montpellier Occitanie

Noëlle Gény, chef de chœur Orchestre national Montpellier Occitanie

Rifail Ajdarpasic, décors

Bettina Walters, costumes

Fabrice Kebour, lumières

Coproduction Opéra national de Lorraine et Opéra-théâtre de Metz Métropole

Durée : 2 h 30 et un entracte

Prochain opéra : Manfred de Robert Schumann

Réservation – Billetterie Opéra Comédie :+ 33 (0)4 67 60 19 99

www.opera-orchestre-montpellier.fr

 

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